LES RAISONS D’UN ENGAGEMENT POLITIQUE DU CHRÉTIEN

1. Jésus face aux pouvoirs politiques et religieux

Jésus dans la société, s’est retrouvé à un certain moment face aux exigences et aux pressions des hommes de son temps. « Pharisiens, scribes et sadducéens sont attaqués comme classes dominantes, détenant indûment le pouvoir d’interpréter la Loi » . Jésus condamne leur agir social de domination sur les pauvres. Il faut dire que la révolte de Jésus contre les maîtres de la Loi est une révolte en faveur de la défense des petits. Jésus se met toujours du coté des opprimés. Il se sent ainsi libre malgré les critiques et les menaces qui lui sont adressées. Le rôle de Jésus ici est de remettre les choses à leur juste place en étant clair avec les pharisiens, les scribes, les sadducéens et en récusant le bien fondé de leur autorité . Et il n’a pas été facile à l’égard de la loi et du pouvoir politique.

L’attitude de Jésus face à la Loi est irréprochable. Il cherche à la dépasser en vue du bien de tous et le salut du peuple. Il part de lui-même et de son expérience divine : « vous avez appris qu’il a été dit, …Et moi je vous dis… » (Mt 5, 43-44). Jésus adopte une attitude qui conteste radicalement la fonction qu’on attribuait à la Loi. Une loi qui ne fonctionne pas bien, on la dénonce et on la change c’est tout. Evidemment, cette attitude de Jésus étonne et scandalise. Il sera coincé par les pharisiens et les scribes : « ils pressent Jésus de question, ils lui tendent des pièges… » . La liberté de Jésus s’est étendue jusque dans le domaine politique. Il parle clairement des hommes politiques et de la gestion de la cité. L’un des exemples qu’on lui reconnaît dans la Bible est son attitude tenace devant les pharisiens à l’égard d’Hérode : « allez dire à ce renard… Car il n’est pas possible qu’un prophète périsse hors de Jérusalem » (Lc 13, 32-33). Il a aussi fait preuve de son autorité.

L’autorité de Jésus s’est faite manifeste dans son enseignement et dans ses relations sociales. Les auditeurs de Jésus furent frappés par sa façon d’enseigner : Saint Marc ne dirait-il pas dans son Evangile qu’Il enseigne avec autorité (Mc 1, 22). Lui, il marque la différence. Il faut dire que les paroles de Jésus commentent son comportement. C’est ce qui fait sa différence avec les pharisiens et scribes. Jésus a montré son autorité à travers la pratique du sabbat. Il donne l’exemple de David . Jésus est clair dans ses enseignements : le sabbat est fait pour l’homme et non l’homme pour le sabbat. Comme nous le voyons donc, Jésus parle avec autorité. On voit donc qu’« il se situe dans un tout autre registre que celui des prétentions humaines finalement ridicules » . Aucune excuse ne pourra donc justifier la privatisation de la foi que nous connaissons aujourd’hui.

2. D’autres raisons de l’engagement politiques du chrétien

L’engagement politique du chrétien ne devrait pas être une initiative venant d’un ordre extérieur à ses convictions chrétiennes personnelles. En effet, comment peut-on parler de foi chrétienne sans l’Amour du prochain ? D’ailleurs la politique est une affaire d’amour du prochain. Servir la cité suppose un grand amour pour les citoyens. L’amour du prochain ne peut pas se limiter au cercle étroit de nos parents et amis.

Un autre aspect de la vie politique qui nécessite l’engagement du chrétien est que le pouvoir politique est souvent le lieu de toutes les corruptions possibles. Il faut opérer un renouvellement de l’ordre temporel. « L’ordre temporel est à renouveler de telle manière que, dans le respect de ses lois propres et en conformité avec elles, il devienne plus conforme aux principes supérieurs de la vie chrétienne et soit adapté aux conditions diverses des lieux, des temps et des peuples.» L’ordre temporel représente ici la famille, les métiers, la culture, les institutions, bref l’ensemble des réalités sociales, économiques et politiques.

Le chrétien doit aussi s’engager parce qu’il est lumière du monde. En effet, éclairés par leur foi, les chrétiens disposent de repères éprouvés pour comprendre les problèmes politiques et sociaux et discerner les solutions qui s’imposent. Aucune humilité ne peut dispenser de cette tâche.

Le chrétien doit s’engager aussi pour que l’évangélisation de la tête puisse être source de conversion pour le pied. En effet, dans la mesure où la société est indispensable à l’épanouissement des hommes, les structures qui assurent sa permanence sont en elles mêmes bonnes car nécessaires. Cependant, que fait l’homme de cette structure ? De la même façon que les structures dirigeantes peuvent inciter au bien, elles peuvent aussi être source du mal, de la corruption. C’est pourquoi, œuvrer à la conversion des individus sans travailler à l’assainissement des institutions dans lesquelles ils vivent, c’est bâtir sur du sable. « La priorité reconnue à la conversion du cœur n’élimine nullement, elle impose, au contraire, l’obligation d’apporter aux institutions et aux conditions de vie, quand elles provoquent le péché, les assainissements convenables pour qu’elles se conforment aux normes de la justice, et favorisent le bien au lieu d’y faire obstacle »

La doctrine sociale de l’Eglise constitue en elle-même une raison pour s’engager politiquement. Il s’agit de tout un enseignement qui donne aux chrétiens les outils nécessaires pour l’engagement sociopolitique.

Le Pape Jean-Paul II définit la Politique dans Christifideles n°42 comme « l’action multiforme, économique, sociale, législative, administrative, culturelles, qui a pour but de promouvoir, organiquement et par les institutions, le bien commun » . En effet, ils sont nombreux les chrétiens qui ont une conception floue et restrictive de la politique et la considère comme une affaire sale où résident la corruption, des coups bas, et tous les vices qui puissent exister, pour justifier leur abstention. Mais le Pape Jean Paul II en réponse à cette attitude dira ceci :

« Les fidèles laïcs ne peuvent absolument pas renoncer à la participation à la « politique », …tous et chacun ont le droit et le devoir de participer à la politique; cette participation peut prendre une grande diversité et complémentarité de formes, de niveaux, de tâches et de responsabilités. Les accusations d’arrivisme, d’idolâtrie du pouvoir, d’égoïsme et de corruption, qui bien souvent sont lancées contre les hommes du gouvernement, du parlement, de la classe dominante, des partis politiques, comme aussi l’opinion assez répandue que la politique est nécessairement un lieu de danger moral, tout cela ne justifie pas le moins du monde ni le scepticisme ni l’absentéisme des chrétiens pour la chose publique. »

C’est dire donc que les alibis derrière lesquels l’on se cache pour ne pas s’engager ne sont pas fondé. En effet, si c’est pour éviter le péché qu’on s’abstient de fréquenter une communauté imparfaite, il faudra donc ne plus vivre en société. Dans tous les cas, si les chrétiens ne s’engagent pas les païens vont le faire et imposer aux chrétiens ce qui va contre leur foi.

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